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01/04/2015

Le poème de la semaine

Jean-Pierre Spilmont

 

L'heure n'est pas aux regrets.

Ils ressemblent aux colombes blanches et grises

qui gonflent doucement la gorge

et pleurent à petits bruits.

 

Il faudrait allumer dans la plaine

un grand feu d'oliviers,

un feu de bois mort,

et, dans une clarté haute et brève,

se délivrer de l'avenir

et habiter l'inconnu qui vient.

 

 

Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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25/03/2015

Le poème de la semaine

Paul-Jean Toulet

Douce plage où naquit mon âme; 
 Et toi, savane en fleurs 
Que l'Océan trempe de pleurs 
 Et le soleil de flamme;
 
Douce aux ramiers, douce aux amants, 
Toi de qui la ramure 
Nous charmait d'ombre, et de murmure, 
 Et de roucoulements;
 
Où j'écoute frémir encore 
 Un aveu tendre et fier - 
Tandis qu'au loin riait la mer 
 Sur le corail sonore.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:02 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

18/03/2015

Le poème de la semaine

Paul Eluard

 

Toutes les choses au hasard

tous les mots dits sans y penser

et qui sont pris comme ils sont dits

et nul n'y perd et nul n'y gagne

 

Les sentiments à la dérive

et l'effort le plus quotidien

le vague souvenir des songes

l'avenir en butte à demain

 

Les mots coincés dans un enfer

de roues usées de lignes mortes

les choses grises et semblables

les hommes tournant dans le vent

 

muscles voyants squelette intime

et la vapeur des sentiments

le coeur réglé comme un cercueil

les espoirs réduits à néant

 

Tu es venue l'après-midi crevait la terre

et la terre et les hommes ont changé de sens

et je me suis trouvé réglé comme un aimant

réglé comme une vigne

 

A l'infini notre chemin le but des autres

des abeilles volaient futures de leur miel

et j'ai multiplié mes désirs de lumière

pour en comprendre la raison

 

Tu es venue j'étais très triste j'ai dit oui

c'est à partir de toi que j'ai dit oui au monde

petite fille je t'aimais comme un garcon

ne peut aimer que son enfance

 

Avec la force d'un passé très loin très pur

avec le feu d'une chanson sans fausse note

la pierre intacte et le courant furtif du sang

dans la gorge et les lèvres

 

Tu es venue le voeu de vivre avait un corps

il creusait la nuit lourde il caressait les ombres

pour dissoudre leur boue et fondre leurs glacons

comme un oeil qui voit clair

 

L'herbe fine figeait le vol des hirondelles

et l'automne pesait dans le sac des ténèbres

tu es venue les rives libéraient le fleuve

pour le mener jusqu'à la mer

 

Tu es venue plus haute au fond de ma douleur

que l'arbre séparé de la forêt sans air

et le cri du chagrin du doute s'est brisé

devant le jour de notre amour

 

Gloire l'ombre et la honte ont cédé au soleil

le poids s'est allégé le fardeau s'est fait rire

gloire le souterrain est devenu sommet

la misère s'est effacée

 

La place d'habitude où je m'abêtissais

le couloir sans réveil l'impasse et la fatigue

se sont mis à briller d'un feu battant des mains

l'éternité s'est dépliée

 

O toi mon agitée et ma calme pensée

mon silence sonore et mon écho secret

mon aveugle voyante et ma vue dépassée

je n'ai plus eu que ta présence

 

Tu m'as couvert de ta confiance.

 

 

Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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11/03/2015

Le poème de la semaine

Charles Cros

Au printemps, c’est dans les bois nus
Qu’un jour nous nous sommes connus.
 
Les bourgeons poussaient vapeur verte.
L’amour fut une découverte.
 
Grâce aux lilas, grâce aux muguets,
De rêveurs nous devînmes gais.
 
Sous la glycine et le cytise,
Tous deux seuls, que faut-il qu’on dise?
 
Nous n’aurions rien dit, réséda,
Sans ton parfum qui nous aida.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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04/03/2015

Le poème de la semaine

Valère Novarina

Aujourd'hui où tout pivote,
se déclenche,
s'enchaîne à grande vitesse
- et où nous pouvons partout reproduire, atteindre,
communiquer et tuer instantanément -,
la question de la représentation est au centre:
la question des images, la querelle des mots...
 
Il y a une lutte contre les images qui urge,
un combat à mener à nouveau contre l'envoûtement
et notre soumission aux idoles.
 
La poésie est comme un coup porté
au monde par-dedans.
C'est une forme acérée du langage,
une guerre dans la pensée contre ce qui est
autour de nous communément propagé:
les mots ne vibrent et ne répandent leurs fortes ondulations
que s'ils ont, comme la flèche,
frappé très exactement au coeur précis.
 
 
C'est alors qu'ils résonnent
comme des projectiles centrés juste.
Ecrire tranche,
et il n'y a rien de plus proche de l'action du poète
que l'ouïe méticuleuse,
la précision aiguë du juriste.
 
Jamais le théâtre,
en tant que lieu où l'image se fissure
et scène d'interrogation du langage,
n'aura été autant au coeur du monde.
 
Jamais la poésie n'aura été plus politique.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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25/02/2015

Le poème de la semaine

Andrée Chedid

Je t'aimais
Dans l'orage des sèves
Je t'aime
Sous l'ombrage des vents
 
Je t'aimais
Aux jardins de l'aube
Je t'aime
Au déclin des jours
 
Je t'aimais
Dans l'impatience solaire
Je t'aime
Dans la clémence du soir
 
Je t'aimais
Dans l'éclair du verbe
Je t'aime
Dans l'estuaire des mots
 
Je t'aimais
Dans les foucades du printemps
Je t'aime
Dans l'escapade des saisons
 
Je t'aimais
Aux entrailles de la vie
Je t'aime
Aux portails du temps
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

18/02/2015

Le poème de la semaine

Anne de Noailles

 

Si tu veux nous ferons notre maison si belle

Que nous y resterons les étés et l'hiver !

Nous verrons alentour fluer l'eau qui dégèle,

Et les arbres jaunis y redevenir verts.

 

Les jours harmonieux et les saisons heureuses

Passeront sur le bord lumineux du chemin,

Comme de beaux enfants dont les bandes rieuses

S'enlacent en jouant et se tiennent les mains.

 

Un rosier montera devant notre fenêtre

Pour baptiser le jour de rosée et d'odeur ;

Les dociles troupeaux, qu'un enfant mène paître,

Répandront sur les champs leur paisible candeur.

 

Le frivole soleil et la lune pensive

Qui s'enroulent au tronc lisse des peupliers

Refléteront en nous leur âme lasse ou vive

Selon les clairs midis et les soirs familiers.

 

Nous ferons notre coeur si simple et si crédule

Que les esprits charmants des contes d'autrefois

Reviendront habiter dans les vieilles pendules

Avec des airs secrets, affairés et courtois.

 

Pendant les soirs d'hiver, pour mieux sentir la flamme,

Nous tâcherons d'avoir un peu froid tous les deux,

Et de grandes clartés nous danseront dans l'âme

uot;>A la lueur du bois qui semblera joyeux.

 

Émus de la douceur que le printemps apporte,

Nous ferons en avril des rêves plus troublants.

- Et l'Amour sagement jouera sur notre porte

Et comptera les jours avec des cailloux blancs....

 

Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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21/01/2015

Le poème de la semaine

Philippe Soupault

Rien que cette lumière que sèment tes mains 
rien que cette flamme et tes yeux 
ces champs cette moisson sur ta peau 
rien que cette chaleur de ta voix 
rien que cet incendie 
rien que toi 
 
Car tu es l’eau qui rêve 
et qui persévère 
l’eau qui creuse et qui éclaire 
l’eau douce comme l’air 
l’eau qui chante 
celle de tes larmes et de ta joie 
 
Solitaire que les chansons poursuivent 
heureux du ciel et de la terre 
forte et secrète vivante 
ressuscitée 
Voici enfin ton heure tes saisons 
tes années 
 
L’automne sur le toit fait un bruit de pigeons 
l’or coule 
Il est midi 
Les arbres ont peur 
La mort vole 
L’odeur de l’agonie 
comme une trop longue musique 
sème des gouttes de sang 
une femme dort 
près d’une fleur gonflée d’eau.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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07/01/2015

Le poème de la semaine

Rosemonde Gérard

merci à Marie-Elisabeth C

L’autre matin, sous la feuillée,
De soleil rose ensoleillée,
Je rêvais à toi, - tu passas!
Et je vis à ta boutonnière,
Penchant ses graines de lumière,
Une branche de mimosas.
 
"Oh! donne-la moi, je t’en prie,
Cette petite fleur flétrie…"
Murmurai-je. Et tu refusas!
D’un œil foncé qui me regarde,
Tu refusas. Tu dis: "Je garde
Cette branche de mimosas."
 
Et, sans voir qu’à cette seconde
Je ne voulais plus qu’elle au monde,
De mon tourment tu t’amusas:
"Il y en a sur la pelouse…
- Non, je veux, car je suis jalouse,
Cette branche de mimosas!
 
Si tu l’aimes, toute fanée,
C’est qu’alors on te l’a donnée,
En te taisant, tu t’accusas.
Parle! nomme-moi ma rivale!
Regarde-moi… je suis plus pâle
Que la branche de mimosas!"
 
Mais toi, d’une voix attendrie,
Tu t’écrias: "O ma chérie,
A mes regards tu proposas
Cent visages: des fous, des sages,
D’autres plus fins que les feuillages
De la branche de mimosas.
 
Mais, très curieux de nature,
Je rêvais de voir la figure
- Car je ne la connaissais pas –
Que vous faites, alors qu’on ose
Vous refuser la moindre chose…
Tiens, les voilà, les mimosas!"
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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17/12/2014

Le poème de la semaine

Maurice Fombeure

Sur la route couleur de sable,
En capuchon noir et pointu,
Le "moyen", le "bon", le "passable"
Vont à galoches que veux-tu
Vers leur école intarissable.
 
Ils ont dans leurs plumiers des gommes
Et des hannetons du matin,
Dans leurs poches du pain, des pommes,
Des billes, ô précieux butin
Gagné sur d'autres petits hommes.
 
Ils ont la ruse et la paresse
Mais l'innocence et la fraîcheur
Près d'eux les filles ont des tresses
Et des yeux bleus couleur de fleur,
Et des vraies fleurs pour leur maîtresse.
 
Puis les voilà tous à s'asseoir.
Dans l'école crépie de lune
On les enferme jusqu'au soir,
Jusqu'à ce qu'il leur pousse plume
Pour s'envoler. Après, bonsoir!
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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